consigne 67
Intimité (Virgul)
« Il faut absolument que je pense à te le dire. Quand je les vois d’en haut, tous attablés, ils sont seuls ou ne se parlent pas. On pense beaucoup, mais on ne se parle pas assez.
Moi aussi aujourd’hui je suis seul, et je me fais la conversation, je me « dialogue » tout seul, mais c’est toi qui es dans mes pensées. Et je me dis que j’ai de la chance d’avoir quelqu’un à qui penser.
Au fond, cela fait plus de trente années que tu… comment dire ? M’occupes ? M’as envahi ? Non, il y a une connotation d’agression qui ne colle pas. Que tu es entrée dans ma vie, que tu y es installée. Ou bien est-ce moi qui t’ai attirée, qui ai ouvert grand la porte, me suis laissé envoûter? Pas une intrusion, mais une invitation à perpétuité.
Dans notre vie, j’ai gardé toute ma tête, hors confusion. Et comme les gens d’en bas, je nous vois vivre à deux. Je nous observe, et cela me surprend. Agréablement. Sereinement.
Notre histoire est comme une patine, nos regrets sont trop légers que pour porter ombrage à notre aujourd’hui, et notre envie est restée intacte de continuer demain.
Suis-je heureux ? Il y a tant de volets dans une vie et tant de choses qui nous entourent ! Si le bonheur égoïste est un état, comme un ressenti, alors oui, je suis heureux. Si le bonheur, lorsqu’il est à notre portée, est un devoir, comme une pierre, une contribution pour améliorer l’Edifice, alors oui, j’y participe.
Seul, je ne pourrais pas, je n’aurais pas pu, c’est dans ma nature. A nous deux, je me sens meilleur, et gourmand de la vie.
Mais est-ce pareil pour toi ? Avec quelle intensité ? Tu n’as pas les mots faciles, surtout ceux pour traduire les émotions. Alors il faut que je pense à te le dire, pour que tu chapardes mes mots et te les appropries »